Ryszard Kapuscinski
Plon, 2000.
Ecrit par un journaliste passionné et connaisseur du continent africain, ce livre propose un autre regard sur le continent qui semble toujours aussi mystérieux et « noir »…. loin des idées reçues et colportées par les images dramatiques des médias. « L’image que se fait l’Europe de l’Afrique se présente ainsi : famine, enfants squelettiques, terre sèche et crevassée, bidonvilles, massacres, sida, foule de réfugiés sans toit, sans vêtements, sans médicaments, sans eau et sans pain. Le monde vole a son secours. L’Afrique a toujours été perçue, et elle continue de l’être, comme un objet, comme le reflet d’une autre étoile, comme un terrain d’action pour les ….missionnaires, les ethnographes et toutes sortes d’organisations caritatives. Néanmoins elle existe, en dépit de tout pour elle-même, en elle-même. » Cependant, il ne serait pas faux de dire qu’en retour, une grande partie l’Afrique ignore le monde occidental (hormis les clichés télévisuels…et ceux de la radio qui ont un sens différent hors de leurs contextes…. ). Ce témoignage de plus d’une quarantaine d’années de pérégrinations hors des sentiers battus et des officiels, en camions de fortune en « bachés », très documenté, tente de réaliser ce va-et-vient relativement périlleux entre la « vision des blancs » et « la visions des noirs », comme si deux visions étaient en elles-mêmes homogènes… Pourtant, conscient de ce danger, l’auteur nous met en garde dès la préface sur ce continent trop vaste pour être décrit en termes simplificateurs : « Nous « disons » Afrique, mais c’est une simplification sommaire et commode. En réalité à part la notion géographique, l’Afrique n’existe pas. … Même pour celui qui dénonce certaines idées reçues, il est parfois difficile de les mettre en pratique. Des expressions comme : “Dans la conception des Africains, la notion de développement n’existe pas, elle est remplacée par la notion de durée. L’Afrique , c’est la durée éternelle.” sont assez réductrices de la complexité culturelle de cette notion de développement. .. Ceci dit, ce témoignage est truffé de remarques d’une grande justesse. L’auteur connait les ficelles et les fonctionnements improvisés qui ont cours dès que l’on pose le pied sur le sol de ce continent : les « batchichs » et négociations permanentes où la bonne humeur finit le plus souvent par s’imposer.
VSR