Leur histoire
Dominique Mainard
Ed. Joelle Losfeld, 2002.
Roman magique où l’enchanteur Merlin s’incarne en un enseignant dans une école de sourds-muets, disponible et plein de psychologie pour Anna qui ne parle pas à 6 ans. Elle n’est pourtant ni sourde ni muette. Anna n’a jamais parlé, emmurée dans une crainte qui n’a pas de mot ni de nom. Merlin s’attache à l’enfant et à la mère, tentant malgré le poids des silences de redonner la parole à Anna et l’espoir à sa mère Nadèjda, qui a vécu à six ans le décès de sa grand-mère comme traumatisant, et s’est tu alors.
Autour des mots et des silences, se tisse une histoire en deux temps, sur deux générations de femmes voire trois : la grand-mère, la mère et la fille.
L’émotion est comme exprimée à l’état brut où les mots du récit sont comme des miracles de communication que permettrait la littérature alors que tout semblait vain et voué à l’échec, à sa répétition en cercles concentriques de générations en générations. La narratrice – la mère – raconte à demi-mot et demi-teinte d’une voie intérieure comme préexistante à la parole, une histoire : leur histoire à elles deux, rien qu’à elles, qui les mettraient à part des autres, de ceux qui n’ont pas d’histoires. Ce double récit – celui des mots entre les mots encore inexistants – donne l’occasion en définitive de réfléchir sur le pouvoir de la parole, sur le rapport étroit entre l’émotion et le langage et comment la parole malgré son apparente rationalité enferme une part non négligeable d’émotion et de mystère.
VSR