Nicolas Fargues

POL, 2006

C’est l’été torride… l’occasion de faire une pause dans la vie frénétique occidentale … de faire une pause de ce métier emporté dans le tourbillon du temps de la société de la connaissance. De revenir à l’essence même.. le partage des lectures… En voici une parmi d’autres…

Un roman d’amour, bien banal, comme il en existe tant. Le sujet inépuisable par excelllence de la littérature . On semble tout avoir vu. Et puis avec “J’étais derrière toi”, on tombe sur le charme d’une écriture limpide, vraie, crue sans le voir, subtile sans chercher à l’être. Une simple écriture actuelle qui dit les choses comme elles sont, comme elles se vivent dans leur désarroi, leur quotidien, leur caractère dramatique, déboussolant sans fard, ni complaisance et encore moins de fioriture. Ce n’est pas de l’écriture pour remplir des pages blanches ou pour faire de la littérature. Un vrai roman où chaque mot sort des “tripes” personnelles du narrateur en pleine crise de couple et fait résonnance dans une époque troublée par la confusion des sentiments, des rôles et des sexes. Et cela raffraîchit et fait du bien. Cela est bien le rôle de la littérature d’arriver à dire avec les mots simples de tous, ce que personne n’arrive à exprimer et qui est là pourtant au coeur et en potentiel d’une nouvelle configuration des sentiments amoureux et des constructions de couple. Ecris à la permière personne du masculin, l’écriture ne joue pas à la superbe en épousant et analysant les moindres méandres des rapports de force dans le couple, elle s’avoue dans la mauvaise place…. la victime dominée, celle qui était traditionnellement réservée au sexe faible, jadis, sans doute avant 1968…. La description par le menu d’un mari éconduit à cause d’un écart d’une nuit. Le couple - la trentaine - en pleine crise des cinq ans de vie commune commence l’apprentissage du vivre ensemble sans fard. La violence des sentiments amoureux fait place à la violence des confidences furtives et trahies. Il ne s’agit plus d’émoi et de coeur qui bat mais de l’envers du décor… des minucules et innombrables blessures infligées quand l’amour s’effrite et que le couple ne s’en remet pas…. Qu’il garde en lui cet état de bonheur collectif, partagé à deux où la fusion des sentiments donne l’illusion de la fusion des existences….. Quand l’aura et la magie disparaissent, l’analyse franche, honnête est comme une bouée que l’auteur offre à son lectorat…. Entre l’amour et la haine il existe cette force de l’humilité, de s’avouer vaincu et de si bien le décrire.

VSR juillet 2006