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25 juil
Rytkéou Youri
Actes Sud, 2001
A travers le récit de la vie d’Unna, petite fille russe de l’ethnie tchoukhe, c’est le destin d’un peuple soumis à une acculturation obligée qui s’exprime avec désespoir.
Unna, scolarisée dans un internat où l’enseignement se fait en russe, fugue pour retrouver le chemin de sa toundra natale. Cependant, peu à peu, de façon insidueuse, il semble n’y avoir d’autre choix pour elle que de retrouver le chemin de l’école, celle de la « civilisation » et du « parti ». Elle se met à nier sa culture d’origine tchoukhe, à la considérer comme « arriérée », et sa terre natale « odieuse ». On assiste alors à l’inexorable décomposition de celle qui veut brûler les étapes d’un changement d’idéologie, de façon de vivre et de penser, pour tourner le dos à son passé comme pour s’imaginer être une autre. Le passé pourtant la rattrape sous la forme innocente d’une grossesse très désirée. Elle s’est éprise d’un directeur de conservatoire de musique tandis qu’elle a gravi les échelons de l’administration et du parti. An nom de sa fulgurante carrière, elle finit par avorter sur les injonctions de ses amis du parti. Sa vie ne devient alors plus qu’une lente dérive dans l’alcool n’ayant plus ni sens, ni repères. La force de ce livre réside dans le fait qu’aucun jugement n’est porté, ni aucune analyse sur ces événements. Il y a comme une sorte de « finesse brute » où tout est dit entre les lignes. Le lecteur est invité à se mettre dans la peau d’Unna favorisant l’empathie de ce dernier pour participer de l’intérieur aux ravages de cette situation d’acculturation. Une occasion d’aborder les divers « contours » de la notion de culture comme « en direct » et de réfléchir aux effets dévastateurs de l’acculturation sur l’individu lorsque ceux-ci aboutissent à une déstabilisation identitaire.
VSR
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